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Mouvement Républicain et Citoyen 71 avec Emmanuel Jallageas, 1er Secrétaire Fédéral

Mouvement Républicain et Citoyen 71 avec Emmanuel Jallageas, 1er Secrétaire Fédéral

avec Jean - Pierre Chevènement


Colloque - « Laïcité, une centenaire d'avenir ? » Georges Sarre

Publié par Baudouin Grégory Mouvement Républicain et Citoyen sur 19 Septembre 2008, 22:07pm

Catégories : #club laicité

Colloque - « Laïcité, une centenaire d'avenir ? »

11 décembre 2005 - Programme du Colloque du Club Laïcité à l'UNESCO - Discours de Georges Sarre


Colloque organisé en collaboration avec le journal Marianne
Dimanche 11 décembre 2005, à partir de 9h30, à l'UNESCO

Introduction des débats : Henri PENA-RUIZ, universitaire, philosophe
1ère table ronde : " Laïcité : un principe des réalités "
Animateur : Nicolas DOMENACH, journaliste à Marianne
INTERVENANTS :
- Martine GOZLAN, Grand Reporter à Marianne
- Mouloud AOUNIT, Secrétaire Général du M.R.A.P.
- Jean-Paul SCOT, Professeur Honoraire d'Histoire
- Guy COQ, Philosophe, membre de la rédaction de la revue Esprit
- Eric FERRAND,Maire adjoint de Paris, chargé de la Vie Scolaire.

2e table ronde : " Quel progrès social pour quelle laïcité ? "
Animateur : Laurent NEUMANN, journaliste à Marianne
INTERVENANTS :
- Jean-Pierre CHEVENEMENT, Ancien Ministre, Maire de Belfort
- François BAYROU, Ancien Ministre, Député des Pyrénées Atlantiques
- Jean-François KAHN, Directeur de Marianne
- Patrick KESSEL, Président d'Honneur des Comités Laïcité République.

Synthèse générale : Natacha POLONY, journaliste à Marianne
Déclaration finale : Georges SARRE, Président du Club Laïcité.


Intervention de Georges Sarre
Mesdames, Messieurs, Chers Amis,

Je vous remercie toutes et tous, qui êtes intervenus lors de ce colloque ou en avez suivi les débats. La laïcité est au coeur de l'idéal républicain, c'est une pierre angulaire du combat biséculaire des forces de progrès contre les obscurantismes et les tenants de l'ordre ancien : il était donc inconcevable que le centenaire de la loi de séparation soit ainsi commémoré en catimini, presque passé sous silence, et c'est pourquoi nous avons tenu à organiser ce débat.

Je remercie mon ami Albert MALLET, l'équipe nationale du Club Laïcité, bien sûr, ainsi que Jean-François KAHN, Lydia SITBON et l'équipe de Marianne, dont le partenariat a permis la belle réussite de cette initiative. Je remercie également Madame Natacha POLONY, Patrick KESSEL et François BAYROU.

Je conclus ce colloque avec une certitude : celle que la laïcité a gagné en France définitivement, qu'elle est ailleurs dans le monde une idée qui fait son chemin, qu'il ne faut céder en aucune manière à cette mode masochiste consistant à croire la République au bord du gouffre, la France en plein déclin et les valeurs laïques en voie de disparaître.

Au contraire, la laïcité à la française fait école et la France continue de montrer le chemin, comme en 1905, où la République aussi était une exception française puisque à cette époque, en dehors de notre pays et de la Suisse, la seule république en Europe était... Saint-Marin.

Un siècle est passé et il n'existe plus de querelle religieuse. La France est apaisée. La liberté de culte est garantie pour tous et la laïcité ne conteste à personne le droit de croire à quoi bon lui semble, comme de ne pas croire. De même qu'elle n'empêche personne d'envoyer ses enfants à l'école confessionnelle et de célébrer son culte, comme de ne pas le faire. Elle permet ce qui est magnifique, la liberté de conscience.

Oui, avec la loi du 9 décembre 1905, la France a pris cent ans d'avance. Elle a montré au monde qu'il était possible de séparer l'Etat et l'Eglise, le politique et le religieux, la loi et la foi, sans que le ciel ne nous tombe sur la tête ! En un siècle, l'exemple français a été peu suivi, en dehors, et encore partiellement, de la Turquie et du Mexique.

Certains pays se sont prétendus laïcs parce qu'ils avaient aboli le statut officiel de la religion. Mais ils l'avaient remplacé par une philosophie d'Etat, par un athéisme de combat, par le matérialisme dialectique. Loin d'être laïcs, ces pays avaient remplacé dans l'espace public une idéologie par une autre. Seul le contenu avait changé. Aujourd'hui, dans un monde menacé par le choc des civilisations, la laïcité est le seul principe, le seul moyen pour faire vivre ensemble des êtres humains aux croyances et aux origines si différentes.

Les mois qui viennent de s'écouler ont montré l'impasse du communautarisme. Aux Pays-Bas, paradis du multiculturalisme, la situation est tendue et les incidents nombreux depuis les assassinats de Pim Fortyun et de Théo Van Gogh. Dans ce pays pragmatique, le modèle d'existence communautaire séparée sur un même sol, est désormais remis en cause.

En Grande-Bretagne, les attentats du 7 juillet dernier ont montré que l'intégration dans l'enfermement communautaire était illusoire. Les terroristes étaient des enfants du pays, qui semblaient bien intégrés selon les normes du multiculturalisme.

Aux Etats-Unis, le cyclone qui a ravagé la Nouvelle Orléans, a montré que dans la plus grande puissance du monde, la pauvreté continue à coller à la couleur de la peau. Des siècles d'existence séparée ne s'effacent pas par quelques mesures de discrimination positive, car même positive, une discrimination reste une discrimination. J'entends déjà tous ceux qui, ici comme à l'étranger, n'aiment pas notre pays, ricaner et s'écrier en choeur : vous oubliez la crise des banlieues, elle a prouvé l'échec de votre modèle républicain.

Rassurez-vous, je n'oublie rien du tout. Seulement, le mois dernier, en France, il n'y pas eu de crise des banlieues. Il y a eu dans les banlieues une expression virulente de la crise française. Je ne me défausse pas en jouant sur les mots. Bien au contraire, derrière cette différence dans l'expression existe une différence d'analyse qui implique des différences de solution. Les mesures prises par le gouvernement ne sont que des rustines et ne règlent rien sur le fond. La crise française trouve son origine, depuis plus de trente ans, dans le chômage de masse et la déconstruction voulue du modèle républicain.

La République n'est pleinement elle-même que si elle est la République sociale, que si chaque citoyen subvient par son travail à ses propres besoins, en dehors de ceux qui doivent bénéficier de la solidarité nationale. Le modèle républicain exige l'emploi. Aussi, le modèle républicain ne permettra pas l'intégration, c'est-à-dire le vivre-ensemble, l'accès à la citoyenneté et la participation égalitaire de tous à la société, tant que persistera un chômage de masse.

Le modèle républicain ne fonctionnera pas tant que, lorsque les Français expriment démocratiquement leur souhait d'une autre politique, comme ils l'ont fait le 29 mai dernier, on change le Premier Ministre, mais on poursuit la même politique. Il devient alors normal que la crise se manifeste avec virulence au niveau du maillon le plus faible de la société française. Celui-ci se trouve dans les banlieues, où le taux de chômage, surtout parmi les jeunes, est le plus élevé.

Comme on dit de son chien qu'il a la rage quand on veut le noyer, on dit que le modèle républicain est en faillite et qu'il faut l'achever, lorsqu'on est contre la République. Dans ce vandalisme législatif dont est menacée la République, on se propose de toiletter, d'adapter ou de moderniser la loi de 1905. En réalité, d'aucuns voudraient l'abroger pour laisser s'instaurer, en France, le communautarisme.

A qui cela profiterait-il ? D'abord, aux intégristes de toutes confessions qui veulent subordonner la loi civile à leur vérité révélée et faire reconnaître par la loi la compétence des tribunaux religieux, pour les questions de statut personnel notamment.

Ensuite, à ceux, souvent les mêmes, qui ont une vision ethniciste du monde, qui pensent qu'un homme se définit par rapport au sang et au terroir, et dont l'idéal est un monde où la naissance est une prison.

Ensuite, aux forces politiques rétrogrades qui comptent sur les clergés et les religions pour être les instruments de contrôle social d'individus soumis. On a bien vu récemment des personnalités religieuses convoquées à cet effet par les autorités de la République. On a entendu récemment une association prendre, au nom de l'islam, un décret religieux concernant l'ordre public, sans émouvoir les autorités de la République.

Enfin, il ne faut pas oublier que le communautarisme trouve un écho à gauche et à l'extrême- gauche, chez les partisans de la « laïcité ouverte ». Leur nouvelle lubie, c'est que l'islam fondamentaliste serait un allié dans la lutte contre la globalisation. La mauvaise conscience coloniale, débouchant sur une culpabilisation permanente de la France et de son histoire, leur fait prendre Tariq Ramadan pour une icône révolutionnaire et les Frères Musulmans pour des progressistes. Ce faisant, ils dupent les jeunes issus de l'immigration, qu'ils conduisent vers l'impasse du ghetto ethnico- religieux, et ils insultent les luttes des progressistes du monde arabe qui, de l'Algérie aux pays du Golfe, paient au prix fort leur volonté de s'émanciper du carcan obscurantiste.

Voilà pourquoi, vraiment, on ne peut « adapter » la loi de 1905. Celle-ci en effet, pose le principe que la religion, toute religion, relève de la sphère privée et se situe hors de l'espace public. Or, on ne peut être à la fois dans l'espace public et en dehors. On n'aménage pas un principe, on le respecte, ou on le transgresse. Aux religions, anciennes ou nouvelles, de s'en accommoder. Et surtout, qu'on ne nous dise pas qu'il faut modifier la loi pour l'adapter à l'islam, sous prétexte que l'islam n'existait pas en France métropolitaine, il y a cent ans ! C'est donner aux islamistes un pouvoir qu'ils n'ont pas. Regardez l'application de la loi sur les signes religieux à l'école publique. Nombre d'observateurs nous avaient promis une guerre scolaire. Or les cas non réglés, au niveau national, n'excèdent pas quelques dizaines. Les associations islamistes n'ont jamais fait descendre dans les rues plus de 10 000 personnes. Elles ont testé la résistance des républicains et des laïcs et, lorsqu'elles se sont aperçues qu'elles étaient infiniment minoritaires, elles ont baissé pavillon.

Tirons-en une leçon : quand la laïcité s'affirme clairement, elle n'est pas contestée. Cessons donc d'être sur la défensive !

La laïcité n'a pas besoin d'être adaptée. Elle doit au contraire être affirmée parce qu'elle est le moyen de vivre harmonieusement ensemble dans l'espace public avec nos diversités, pleinement respectées dans la sphère privée. La laïcité est la condition de la citoyenneté. Pour qu'ils deviennent citoyens, l'école de la République doit apprendre aux enfants à penser par eux-mêmes dans le respect de la liberté des autres, en dehors de tout dogme et en dehors de tout clergé. Le dogme est cette prétendue vérité, venue d'ailleurs, qui veut s'imposer sans discussion au débat public. Le clergé est tout corps qui prétend s'imposer dans l'espace public au nom d'une autorité que le peuple ne serait pas digne de contrôler.

Mesdames, Messieurs,

Chers Amis,

Comme toute loi républicaine, la loi du 9 décembre 1905, portant séparation des Eglises et de l'Etat est une loi libératrice. Elle assure la liberté des citoyens, qui peuvent croire ou ne pas croire. Elle assure la liberté de l'Etat, qui peut légiférer en dehors de toute intervention extérieure au débat public. Elle assure la liberté des religions, qui peuvent s'organiser comme elles l'entendent, tant qu'elles ne troublent pas l'ordre public. Elle a permis de parvenir à l'égalité des sexes, au droit pour les femmes de choisir leur vie et de maîtriser leur corps, acquis intangibles que les intégristes de toute confession cherchent aujourd'hui à saboter, remettant en question le droit au divorce et à l'avortement, proposant de tolérer la polygamie et l'excision au nom du « droit à la différence ».

Redisons-le haut et fort : la loi de 1905 est une loi pacificatrice. Depuis les origines, les passions religieuses furent exacerbées en France. Clovis combattit les autres peuples germaniques, Burgondes, Alamans ou Wisigoths, qui professaient l'hérésie arienne. Charlemagne convertit les Saxons par le fer et par le sang. Le Languedoc connut les affres de la croisade des Albigeois. La guerre entre catholiques et protestants dura quarante ans. La révocation de l'édit de Nantes provoqua le départ de dizaine de milliers de réformés. La querelle autour du jansénisme se prolongea durant presque tout le XVIIIème siècle. La question religieuse atteignit son paroxysme pendant la Révolution. Trois archevêques de Paris moururent de mort violente au cours du XIX ème siècle.

Au contraire, depuis 1905, la France vit dans la paix religieuse, alors que jamais, au cours de son histoire, il n'y eut sur son sol une telle diversité de croyances. La centenaire a fait ses preuves. A nous de la faire vivre et de savoir la proposer au monde.

A nous de donner à la République sa plénitude exemplaire. Alors, la laïcité sera une promesse de paix et de liberté.

Vendredi 20 Juin 2008
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